Existe-t-il un lien entre l’obésité et l’allergie?

 

L’obésité et les allergies alimentaires sont deux problèmes de santé qui ont pris de l’ampleur durant la dernière décennie. Un article paru dernièrement dans les médias proposait que les obèses ont plus de risques d’avoir des allergies alimentaires, plus particulièrement au lait. Il existe d’ailleurs une grande étude à l’origine de ces propos. Le texte qui suit tentera d’expliquer la méthode utilisée, les résultats obtenus ainsi que ce qu’il est possible de conclure à partir de cette étude.

Réalisée en 2005-2006, aux États-Unis, l’étude NHANES III (National Health and Nutrition Examination Survey) a été menée périodiquement afin d’identifier le profil nutritionnel et de santé d’enfants et d’adultes américains. Il s’agit, à ce jour, de la plus grande étude présentant des données mesurées sur les allergies et l’asthme aux États-Unis. Afin d’obtenir les données concernant les allergies alimentaires, deux méthodes ont été appliquées chez des enfants âgées entre 2 et 19 ans. Dans un premier temps, un questionnaire devait être rempli pour identifier les symptômes des enfants évalués. Dans un deuxième temps, on mesurait la quantité totale d’IgE sanguins ainsi que certains IgE spécifiques (ex : chats, chiens, souris, arachides, oeufs, lait, crevettes).

Le but de l’étude était de voir s’il y avait un lien entre les allergies et l’obésité puisque ces deux problèmes de santé ont connu une forte croissance au cours des dernières décennies.

Effectivement, aux États-Unis, les allergies alimentaires ont augmenté de 18% entre 19971 et 2007 tandis que l’obésité est passée de 5% avant les années 1980, à 19% en 2004.2 Cette étude a démontré une relation entre l’obésité et les allergies alimentaires chez la population américaine âgée entre 2 et 19 ans. En effet, il y avait davantage de personnes aux prises avec des allergies alimentaires chez les gens obèses que ceux ayant un poids normal. Selon les chercheurs, l’incidence des allergies alimentaires était plus élevée de 60% chez les personnes obèses que chez les personnes de poids normal. Il est important de noter qu’il s’agit d’une association plutôt que d’un lien de cause à effet. De plus, il n’est pas possible de savoir avec ce type d’étude dans quel sens a lieu l’association. Est-ce l’obésité qui favoriserait l’apparition des allergies alimentaires ou l’inverse? L’hypothèse d’un troisième facteur, encore inconnu, qui causerait à la fois l’obésité et les allergies alimentaires ne peut être exclue. Pour le moment, il s’agit d’un véritable mystère.

L’hypothèse principale des chercheurs était que l’inflammation pourrait être la caractéristique commune à l’obésité et aux allergies alimentaires. Il est connu que les allergies alimentaires, tout comme l’obésité, sont associés à un niveau élevé d’inflammation c’est-à-dire une réponse exagérée du corps humain. Toutefois, cette étude n’a pas permis de conclure sur ce point. Bien que la recherche soit intéressante, il est essentiel de nuancer la situation. Parmi les allergènes évalués, la plupart étaient de type respiratoire. Les résultats étaient plus significatifs pour les allergènes alimentaires certes, mais il n’en demeure pas moins qu’ils étaient peu nombreux à avoir été évalués. De plus, la prise d’anti-histaminiques n’était pas prise en considération lors des tests du niveau d’IGE. Or, il est bien connu que la prise d’anti-histaminiques fausse les résultats en donnant de faux négatifs chez une personne allergique. Ces facteurs constituent des sources de biais non négligeables.

Afin d’établir le véritable lien entre l’obésité, les allergies alimentaires et l’inflammation, des études d’intervention ou des études longitudinales (dans le temps) seront nécessaires. L’AQAA suivra le dossier et vous partagera les données intéressantes le cas échéant.

Par Stéphanie Pernice, étudiante en nutrition et Rosanne Blanchet, Dt.p. MSc.

Written by Association québécoise des allergies alimentaires